Le nouveau texte, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2023, prévoit :
- l’inclusion de nouveaux risques dans l’Etat des Risques (I) ;
- de nouvelles obligations pesant sur le propriétaire de l’actif relativement à la communication des risques (II) ;
- de nouvelles sanctions à défaut de respect des obligations susvisées (III).
I. Les risques mentionnés dans l’Etat des Risques : ajout du risque lié à la montée du niveau de la mer
Le Code de l’environnement prévoit désormais que les propriétaires « de biens immobiliers situés dans des zones couvertes par un plan de prévention des risques technologiques, par un plan de prévention des risques miniers ou par un plan de prévention des risques naturels prévisibles, prescrit ou approuvé, dans des zones de sismicité ou dans des zones à potentiel radon définies par voie réglementaire ou dans une zone susceptible d'être atteinte par le recul du trait de côte » doivent informer leur acquéreur ou leur locataire de l’existence de ces risques en établissant un Etat des Risques.
L’ajout le plus conséquent, en matière de risques couverts par l’Etat des Risques, consiste dans l’inclusion des zones susceptibles « d'être atteintes par le recul du trait de côte. » Ce risque, qui se matérialise pour certains actifs situés à proximité des mers et océans, s’attache donc à l’avancée de la mer sur les terres.
II. Nouvelles modalités de l’obligation d’information
Antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi Climat et Résilience, le propriétaire d’un actif immobilier avait l’obligation :
- de « joindre » c’est-à-dire, en pratique, d’annexer l’Etat des Risques au contrat ; et
- « d'informer par écrit l'acquéreur ou le locataire de tout sinistre survenu pendant la période où il a été propriétaire de l'immeuble ou dont il a été lui-même informé » lorsque l’actif avait subi un sinistre ayant donné lieu au versement d'une indemnité en application des articles L. 125-2 ou L. 128-2 du Code des assurances.
Ces deux catégories d’obligations, propres d’une part à l’existence de risques inhérents au terrain d’assiette de l’actif et, d’autre part, à l’existence de sinistres générés par ces risques ont été modifiées et renforcées par la loi Climat et Résilience.
A. L’obligation de transmission des risques inhérents au terrain d’assiette de l’actif : (nouvelles) obligations précoces d’information
A compter du 1er janvier 2023 le propriétaire sera tenu, en sus des obligations qui précèdent, de transmettre à sa contrepartie, en amont de la signature du contrat (relatif à la location ou à la cession de l’actif), les informations utiles relatives aux potentiels risques couverts par l’Etat des Risques. Cette obligation de transmission d’information « précoce » se matérialise en deux temps puisque le propriétaire d’un actif a désormais l’obligation :
- d’inclure dans « toute annonce, quel que soit son support de diffusion, relative à la vente [ou à la mise en location] d'un bien immobilier devant faire l'objet d'un Etat des Risques […] une mention précisant le moyen d'accéder aux informations mentionnées » dans l’Etat des Risques afférent à son actif ; et
- de « remettre » au(x) potentiel(s) acquéreur(s) ou locataire(s) l’Etat des Risques « lors de la première visite de l'immeuble, si une telle visite a lieu ».
Quelques remarques peuvent ici être formulées concernant ces obligations nouvelles :
Tout d’abord le Code de l’environnement ne précise pas comment doit se matérialiser l’obligation consistant à donner « le moyen d'accéder aux informations » mentionnées dans l’Etat des Risques qui doit être inclus dans les annonces relatives à la vente du bien – un simple lien vers le site généraliste « georisques.gouv.fr » (à savoir l’une des bases de données permettant d’établir les Etats des Risques) sera-t-il considéré comme suffisant pour satisfaire à l’obligation susvisée ? Il faut l’espérer.
Ensuite, les propriétaires devront veiller à documenter le fait qu’ils se sont acquittés des obligations précitées. L’ajout systématique d’une clause spécifique dans le contrat de vente ou de location (par laquelle la contrepartie reconnait avoir notamment effectivement reçu un Etat des Risques lors de la première visite de l’actif) ne peut être que recommandé.
En tout état de cause, les propriétaires d’actifs auront intérêt à veiller à rédiger soigneusement les mandats éventuellement passés avec les commercialisateurs de leurs actifs pour s’assurer que ces tiers intermédiaires (qui sont généralement en charge d’organiser les visites des actifs et sont par ailleurs les rédacteurs / diffuseurs des annonces relatives à la mise en vente ou location d’actifs) respecteront scrupuleusement les obligations nouvelles susvisées.
B. L’obligation d’information des sinistres indemnisés : clarification des modalités
Antérieurement à 2023, le propriétaire était tenu d’informer sa contrepartie (acquéreur ou locataire) des éventuels sinistres (causés par les risques couverts par l’Etat des Risques) ayant affectés l’actif (et donné lieu au versement d'une indemnité en application des articles L. 125-2 ou L. 128-2 du Code des assurances). Cette information devait être donnée « par écrit » (pour les cessions et pour les baux) et la loi précisait que, « en cas de vente de l'immeuble, cette information est mentionnée dans l'acte authentique constatant la réalisation de la vente. »
Les actes de ventes (mais également les baux) contenaient ainsi généralement une clause spécifique relative à la présence ou l’absence de sinistres indemnisés. Cette information était parfois également reprise dans l’un des feuillets de l’Etat des Risques et Pollution (destiné à être rempli et signé par les parties).
Le nouvel article L. 125-5 (IV) du Code de l’environnement précise désormais que le vendeur ou le bailleur de l'immeuble est tenu d'informer sa contrepartie des sinistres indemnisés « dans l'état des risques ». En d’autres termes il faut comprendre de ce texte que les clauses relatives aux éventuels sinistres indemnisés insérées dans les actes de vente et dans les baux n’auront plus d’intérêt puisque cette information devra figurer directement dans l’Etat des Risques joint en annexe de l’acte.
Cette précision purement formelle peut sembler dérisoire. Elle n’est toutefois pas à négliger eu égard à la sévérité dont ont pu faire preuve les juges français relativement au formalisme attaché à l’Etat des Risques ainsi qu’à la mise en œuvre des sanctions qui y sont attachées.
III. Sanctions : un dispositif qui soulève de multiples interrogations
A. Sanctions du défaut de transmission de l’Etat des Risques : rien ne change
Depuis sa création (en 2003) le défaut de transmission d’un Etat des Risques était sanctionné par la possibilité offerte à l’acquéreur ou au locataire de « poursuivre la résolution du contrat ou[de] demander au juge une diminution du prix. »
Ces sanctions demeurent de mise (i) dans l’hypothèse où l’Etat des Risques ne serait pas annexé au contrat et/ou (ii) dans l’hypothèse où l’information relative aux sinistres indemnisés ne figurerait pas dans l’Etat des Risques. Pour rappel, la jurisprudence sanctionne pareillement le défaut de signature de l’Etat des Risques par les parties ou le fait d’annexer au contrat un Etat des Risques datant de plus de six mois (l’article R. 125-26 du Code de l’environnement imposant que l’Etat des Risques (i) soit établi « conformément à un modèle défini par arrêté » - lequel modèle prévoit un encart réservé à sa signature par les parties - et (ii) soit « établi moins de six mois avant la date de conclusion du contrat »).
B. Sanctions du défaut des obligations nouvelles de transmission « précoces » de l’Etat des Risques : rien n’est prévu
Le nouvel article L. 125-5 du Code de l’environnement reste muet quant aux sanctions attachées aux obligations nouvelles de transmission précoces de l’ERP (ou plus exactement à l’obligation d’inclure, dans les annonces relatives à la mise en vente ou location d’un actif, le « moyend'accéder aux informations mentionnées » dans l’Etat des Risques et à l’obligation de remettre l’Etat des Risques lors de la première visite de l’actif).
Le défaut de sanction spécifique dans le texte ne signifie pas impunité et les règles de droit commun de la responsabilité peuvent trouver à s’appliquer. La mise en jeu de la responsabilité contractuelle du vendeur (ou du bailleur selon le cas) est en principe possible si sa contrepartie subit un préjudice du fait de la non-communication des informations susvisées. En pratique cette possibilité se heurtera à des difficultés de preuve et à la difficulté de justifier d’un lien de cause à effet entre le défaut d’information et le préjudice invoqué par l’acquéreur (ou le locataire selon le cas).
C. Sanctions applicables en cas de vente d’un immeuble à usage d’habitation à un non-professionnel : rien ne va plus !
En sus des sanctions « historiques » susvisées, le Code de l’environnement ajoute une précision qui soulève plus de questions qu’elle n’en résout. En effet l’article L. 125-5 du Code de l’environnement prévoit désormais que « lorsque l'état des risques n'est pas remis à l'acquéreur au plus tard à la date de signature de la promesse de vente ou du contrat préliminaire [ou lorsque l'acte authentique de vente n'est pas précédé d'une promesse de vente ou d'un contrat préliminaire et que l'état des risques n'est pas joint à l'acte authentique de vente], le délai de rétractation prévu à l'article L. 271-1 [du Code de la construction et de l’habitation] ne court qu'à compter du lendemain de la communication de ce document à l'acquéreur. »
Pour mémoire l’article L. 271-1 du Code de la construction et de l’habitation susvisé prévoit la possibilité, pour l’acquéreur non-professionnel ayant conclu un acte ayant pour objet l’acquisition d’un immeuble à usage d’habitation de « se rétracter dans un délai de dix jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l'acte. »
En d’autres termes, l’acquéreur non-professionnel ayant acquis un immeuble à usage d’habitation pourrait exercer une faculté de rétractation (de la vente conclue) dans les dix jours suivant la date à laquelle un Etat des Risques lui sera communiqué – si cet état n’est pas joint à la promesse ou à l’acte de vente selon le cas.
Cette possibilité de rétractation est-elle cumulative avec la possibilité de demander la nullité de la vente ou la diminution du prix ? Le texte n’apporte pas de réponse à cette question. Si ces deux mécanismes de sanctions se superposent alors l’acquéreur non-professionnel pourrait demander la résolution de la vente, ou la réduction du prix (et ce dès la conclusion de l’acte translatif de propriété) ou éventuellement exercer une faculté de rétractation mais uniquement lorsqu’il obtiendra communication de l’Etat des Risques (à supposer qu’il lui soit communiqué). Le cumul de l’ensemble des sanctions susvisés semble s’imposer malgré son évidente complexité.